République islamique de Mauritanie Honneur – Fraternité-Justice
Conseil constitutionnel
Décision 09/CC/2024
Le Conseil constitutionnel ;
Vu la Constitution du 20 Juillet 1991 révisée,
Vu l’Ordonnance n° 92-04 du 18 février 1992 portant loi organique relative au
Conseil Constitutionnel ;
Vu la loi organique 2018/013 portant recomposition du Conseil constitutionnel ;
Vu la loi N°014/2016en date du 15 Avril 2016 relative à la lutte contre la corruption
Vu la Requête visant à attaquer la constitutionnalité de l’alinéa B/1 de l’article 2 de la loi
014/2016 en date du 15 Avril 2016 relative à la lutte contre la corruption enregistrée au Secrétariat Général du Conseil constitutionnel le 27/11/2024 parl’ancien président de la République Mohamed Ould Abdel Aziz, représenté parses avocats ;
Sur la forme :
Considérant qu’il ressort de l’extrait de la décision 01/2024 de la chambrecorrectionnelle pénale du
Tribunal de Nouakchott Ouest en date du 13/11/24 que Monsieur Mohamed ould Abdel Aziz a opposé la non constitutionnalité de l’article 2 de la loi 014/2016 en date du 15 Avril 2016 relative à la lutte contre la corruption ce qui lui ouvre un délai de 15 jours pour saisir le Conseil constitutionnel de la question préjudicielle de constitutionnalité ;
Considérant que Monsieur Mohamed ould Abdel Aziz représenté par sa défense a introduit une
Requête au secrétariat général du Conseil constitutionnel en date du 27/11/2024 soulevant la question
Préjudicielle de constitutionnalité contre l’article 2 de la loi N°014/2016 relative à la lutte contre la
Corruption ;
Considérant que le requérant a rempli les conditions prévues à l’article 4 de la loi organique 2018/013
en date du 15 Avril 2018 portant recomposition du Conseil constitutionnel qui définit les conditions d’application de l’aliéna 5 de l’article 86 de la Constitution ; que dès lors sa requête est jugée recevable en la forme ;
Sur le fond
Considérant que le requérant estime que l’article 2 de la loi 014/2016 en date du 15 Avril 2016 relative à la lutte contre la corruption est en contradiction avec les principes constitutionnels clairs ainsi que les principes généraux à caractère constitutionnel définissant le statut juridique du Président de la République,par conséquent, il demande au Conseil constitutionnel de déclarer l’alinéa B/1 de l’article contesté , non conforme à la Constitution au motif qu’il porte préjudice aux droits et libertés garantis par l’article 93de la Constitution .Il argumente par le fait que le texte contesté réduit le statut du Président de la République au statut d’un fonctionnaire ordinaire qui doit répondre de ses actes pendant l’exercice de ses fonctions en le soumettant au régime des sanctions correctionnelles ce qui le met sous l’emprise de la loi de lutte contre la corruption, accusé par le parquet Généralet jugé devant les tribunaux ordinaires ce qui est contraire aux dispositions des articles 24, 27 et 93 de la Constitution selon le requérant ;
Considérant que le fonctionnaire public par la définition introduite par la loi de la lutte contre la corruption inclut toute personne assumant un service public au profit de l’Etat, y compris le Président de la République et ne se limite pas à la définition de l’agent publicmentionnédans la loi 93-09 en date 18 Janvier 1993 ;
Considérant que l’annulation l’alinéa B/1 de l’article 2 de la loi de la lutte contre la corruption, aura systématiquement pour effet de vider le reste du texte de loi de tout sens et de ,le rendre sans portée réelle , au motif qu’il donne l’immunité aux détenteurs des pouvoirs publics, ce qui constitue en soi une grave violation de ladite loi ;
Considérant que l’intérêt général, qui a inspiré l’adoption d’une telle loi de lutte contre la corruption exige que tous, sans exception doivent nécessairement répondre des violations en vertu de cette loi ;
Considérant, que les garanties accordées au Président de la République en vertu de l’article 93 ne sont en rien affectées par le texte contesté
Après instruction de la requête ;
Le rapporteur entendu
Après délibérations ;
Décide :
Article premier : L’alinéa B/1 de l’article 2 de la loi n°014/2016 en date du 15 Avril 2016 relative à la lutte contre la corruption, n’est pas contraire à la Constitution.
Article2 : L’alinéa B/ 1 de l’article 2 de la loi n°014/2016 en date 15 Avril 2016 relative à la lutte contre la corruption n’est pas en contradiction avec les droits et libertés accordés au Président de la République en vertu l’article 93 de la Constitution.
Article 3 : Cette décision sera notifiée à qui de droit et publiée au Journal officiel de la République Islamique de Mauritanie.
Délibéré par le Conseil Constitutionnel dans sa séance du 5 Décembre 2024 enprésence du président Mr Diallo Mamadou Bathiaet les membres : AichetouMint Decheg, , Ahmed Vall Ould M’Barek, , Ahmed Ould Ahmed Djibaba,Bilal ould Dick, Hawa Tandia, Ikebrou Mohamed Sedigh et Ghaly Mahmoud
Le Rapporteur Le Président
Ahmed Vall ould M’Bareck Diallo Mamadou Bathia
PCCC
Ebneta Mint El Khaless